Du bon usage de l’autorité

Education Le rêve de nombre de parents? Se faire obéir des enfants sans élever la voix ni se répéter comme un perroquet. L’autorité, tout un programme!
(tiré du magazine Coopération No 51)


Il m’oblige à élever la voix
Crier n'est pas une bonne idée: c'est souvent l'aveu d'une impuissance parentale. De plus, cela risque de devenir un mode de fonctionnement familial, pénible pour la quiétude du logis, que l'enfant reproduira plus tard. Pour être écouté, il suffit parfois d'introduire une rupture dans le ton. Le hausser un peu ou parler plus fermement en se rapprochant de l'enfant, en le regardant dans les yeux et en lui touchant l'épaule.
Il n’a pas obéi
Ne pas hésiter à marquer votre mécontentement. «Ta conduite me déçoit.» Un peu de culpabilité ne nuit pas et permet à l’enfant d’intégrer l’effet négatif de sa désobéissance. Et puis punir, raisonnablement. «Plus de télé jusqu’à Noël» est dur à tenir. Si on manque d’idées sur le moment, on peut différer: «Ce que tu as fait mérite une punition, nous allons y réfléchir avec ton père.» La meilleure des punitions reste la réparation: nettoyer ce qu’on a sali, ranger, demander pardon…
On dirait qu’il n’entend pas
On a plus de chances que l’enfant obéisse en lui disant ce qu’il a à faire de manière positive. «Marche doucement, le sol est glissant» est plus acceptable que «ne cours pas, tu vas tomber». Ne pas multiplier les consignes: l’enfant a le sentiment de se trouver devant un mur de «non», ce qui est décourageant. Etre précis avec ce qu’on demande. Plutôt qu’un vague «sois sage chez mamie», expliquer que «grand-maman supportant mal le bruit, il ne faut pas courir chez elle».
Il faut tout lui répéter
L’une des règles d’or de l’éducation est de ne pas être pressé. Prendre le temps d’expliquer. «Je comprends que tu sois déçu, mais en mangeant des bonbons tu donnes de mauvaises habitudes à ton corps.» Parfois, montrer qu’on sait céder aussi. «Tu ne veux pas ranger tes jouets? Alors quand penses-tu le faire?» L’enfant a l’impression qu’il peut décider de sa vie et ça le réjouit. Vérifier qu’il fait ce qu’il a dit. Cette façon de le rendre acteur de sa vie peut débloquer le rapport de force parent/enfant.
Les menaces ne lui font pas peur
Normal s’il en entend à longueur de journée! Apprendre à contrebalancer les réprimandes par des compliments. Au lieu de pointer en permanence ce qui ne va pas, inverser la tendance. «Tu n’es pas un champion pour tenir tes couverts, mais avec tes Lego, tu es un as.» Souligner ses progrès: «Ta chambre est mieux rangée qu’hier, bravo!» Et plutôt que menacer, «encore un verre renversé et tu n’iras pas à l’anniversaire de ton copain», annoncer une récompense: «Si tu vas prendre ton bain, tu pourras jouer encore un peu.»
Conseils: l’autorité en pratique
«Apprendre à se faire obéir» propose le psychologue Stéphane Clerget dans un livre* bourré de conseils utiles. Cinq cas concrets.
* Parents, osez vous faire obéir, Stéphane Clerget, Bernadette Costa-Prades (Albin Michel)
      
«Eduquer, c’est…contrarier!»
Dans ses livres* et ses conférences, la psychologue Anne Bacus préconise l’autorité dans l’éducation des enfants. Ça les aide vraiment à «bien» grandir.
Interview Véronique Châtel
Les parents ont du mal à se faire obéir. Pourquoi?
C’est comme s’ils avaient perdu la légitimité de poser des limites à leurs enfants. Ils sont capables de dire «ne te penche pas à la fenêtre» car ça relève de leur sécurité, mais pour le reste, ils manquent d’aplomb. Ils se lancent dans de longues explications, discutent, négocient. Au final, cela donne ces remarques totalement inadaptées: «Je t’ai expliqué, enfin, tu vois bien que j’ai raison, non? Pourquoi tu fais ça? Pourquoi tu n’écoutes pas?» Un enfant, a fortiori de moins de 7 ans, n’obéit pas au sens ni à la raison raisonnable, mais parce qu’il sent qu’il le faut.
Il ne faut plus «expliquer» comme le préconisait Françoise Dolto?
On a mal compris Françoise Dolto. Elle a dit que les enfants n’étaient pas des tubes digestifs, qu’il fallait donc leur parler, mais elle n’a jamais prétendu qu’il fallait discuter de tout et tout comprendre. Les enfants sont incapables de choisir ce qui est bon pour eux. Mais les jeunes parents n’ayant souvent pas connu d’enfants avant d’en faire eux-mêmes ne savent pas comment ils fonctionnent. Ils ignorent que ce sont des êtres en construction, en évolution et que leur rôle est de les aider à canaliser leurs pulsions et à les différer dans le temps.

Quand peut-on dire qu’il y a un bon cadre dans une famille?
Quand tout n’est pas en permanence discuté et remis en question: le bain, l’heure du coucher, les repas, la télé… Si tout ce qui constitue la vie quotidienne est source de conflits, ça ne va pas. L’attitude des enfants est aussi une bonne indication de ce qui se passe dans la famille. Car l’absence d’autorité angoisse les enfants. Ça les rend tyranniques, revendicatifs, plaintifs. Pour qu’ils trouvent leur équilibre et se développent harmonieusement, ils doivent se sentir en sécurité et donc cadrés par des limites claires, mais pas trop restrictives, autour d’eux.
* Anne Bacus est notamment l’auteur du Guide des mamans débutantes
et de L’autorité, pourquoi, comment, tous deux publiés chez Marabout


19/12/2007
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